Jan Hus

Maître Jan Hus

Le 6 juillet prochain, 600 ans se seront écoulés depuis la mort du réformateur tchèque Jan Hus sur le bûcher. A cette occasion, Radio Prague prépare une émission spéciale où seront invités des spécialistes du mouvement hussite et qui s'intéressera aux divers événements liés à cet anniversaire.

...cherche la vérité, écoute la vérité, apprends la vérité, aime la vérité, défend la vérité jusqu'à la mort, car la vérité te sauvera...

La vie et l'oeuvre de Hus sont, entre autres, une sorte de réaction à l'effondrement de l'autorité suprême de l'Eglise et du système féodal. Dans cette Europe où toutes les autorités vacillent, dans l'Eglise divisée par le schisme, c'est-à-dire l'existence simultanée de deux papes, et traversant une profonde crise, Hus poursuit passionnément la recherche d'une autorité spirituelle inébranlable.

Recteur de l'Université, confesseur de la reine, prédicateur célèbre, Hus jouit à la charnière du 14ème et du 15ème siècles d'un renom tout à fait exceptionnel. Bien qu'il poursuive la tradition du mouvement critique qui se forme dans l'Eglise en Bohême depuis une trentaine d'années, il donne à sa critique un ton nouveau et aussi une solide base théorique. Il sent que l'Eglise corrompue ne peut pas servir d'exemple au peuple, que le clergé vicieux n'a pas le droit d'exiger que les laïcs mènent une vie vertueuse.

Disciple de John Wyclif de l'Université d'Oxford, il prêche non seulement contre le trafic des indulgences - la simonie - mais il est logiquement du côté de Wyclif dans la querelle philosophique entre les nominalistes et les réalistes qui marque profondément la théologie du Moyen Age. Pour Hus, les choses ne sont pas mauvaises, parce que Dieu les défend, mais Dieu les défend parcequ'elles sont mauvaises. Et même si Dieu disparaissait, éternellement le bien demeurerait le bien et le mal le mal. Cette attitude philosophique donne donc à Hus aussi une base spirituelle solide pour son attitude morale et pour la critique du clergé qui n'est plus, à ses yeux, une caste intouchable et privilégiée, mais est réduite au rôle de serviteur.

Václav Brožík, 'Maître Jan Hus au Concile de Constance', 1883, foto: GHMPVáclav Brožík, 'Maître Jan Hus au Concile de Constance', 1883, foto: GHMP Sa doctrine se propage rapidement et provoque une violente réaction du clergé. Lorsque l'Eglise convoque, en 1414, le Concile de Constance pour sortir de la crise et pour mettre fin au schisme, Hus accepte de s'y rendre. L'empereur Sigismond lui promet de le soustraire au danger qu'une telle entreprise représente pour l'homme considéré comme hérétique et lui délivre un sauf conduit qui doit le protéger.

A Constance, Hus, qui veut défendre ses idées, se heurte à un mur d'incompréhension. Il refuse d'abjurer les idées qu'il sait justes et qu'il défend depuis de longues années. En abjurant, il sauverait sa vie, mais il perdrait son âme. L'empereur Sigismond lui enlève sa protection et Hus, dépouillé de ses privilèges de clerc, est remis à la justice séculaire et condamné à mourir par le feu.

"Dieu m'est témoin," dit-il "que ce que ces faux témoins ont inventé en me l'attribuant, je ne l'ai ni enseigné, ni prêché. Je n'ai voulu surtout qu'une seule chose par mes paroles, par mes écrits, j'ai enseigné, j'ai prêché la vérité de l'Evangile d'après les écrits et la doctrine des saints docteurs. C'est pourquoi aujourd'hui je meurs joyeux."

Jan Hus est un personnage historique, mais aussi une légende. On peut dire que depuis le 15ème siècle, chaque époque, chaque siècle de l'histoire des pays de la couronne tchèque était confronté avec l'oeuvre, la mort, et la légende de Hus et que les attitudes vis-à-vis de Hus évoluaient avec la société.

 

Les endroits liés à Jan Hus

Husinec

La ville natale de Jan Hus.

L'université Charles

Jan Hus étudie à l'université de Prague où il obtient sa licence en 1393 et la maitrise en arts libéraux en 1396. En 1400, il est nommé professeur à l'université, ordonné prêtre et il commence à prêcher à l'église de Saint-Michel. En 1401, il devient doyen de la faculté de philosophie et, un an plus tard, recteur de l'université de Prague.

Prague est capitale du Saint-Empire romain germanique et son université, véritablement internationale, est divisée en sections (aussi appelées « nations ») bavaroise, tchèque, saxonne et polonaise. Chacune des « nations » dispose d'une voix lors des votes décisifs sur l'administration de l'université.

En 1407, l'archévêque de Prague est chargé par le pape Grégoire XII d'interdire la diffusion des thèses hérétiques de John Wyclif. L'université (le système éducatif est alors religieux et dominé par l'Église) condamne comme hérétiques les théories de Wyclif, qui ont été introduites en Bohême une vingtaine d'années auparavant : en 1381, son opinion sur l'eucharistie est débattue par Mikuláš Biskupec et, en 1393, c'est l'archevêque de Prague, Jean de Jenstein, qui prêchait contre les idées wycliffiennes au regard de la richesse (ou plutôt de la pauvreté nécessaire) de l'Église.

Jan Hus avait traduit le Trialogus de Wyclif en tchèque. Il louvoie entre son allégeance envers l'Église et son idéal wycliffien : le 14 mai 1408, la nation tchèque de l'université de Prague (sous la houlette de Hus) rejette publiquement les articles de Wyclif mais souligne que, correctement interprétés dans leur contexte, ces articles ne sont pas totalement hérétiques. L'archevêque de Prague, benoîtement, écrit au pape Grégoire XII qu'il n'y a pas d'âme errante en Bohême.

Les autres nations décident de se ranger fermement auprès de Grégoire XII mais Hus utilise, pour défendre son idéal, l'opposition du roi Venceslas à Grégoire XII et obtient, en 1409, que la nation tchèque eut trois voix lors des votes décisifs sur l'administration de l'université, les autres nations n'en bénéficiant que d'une voix chacune. Cette décision, appelée aussi décret de Kutná Hora, provoque le départ des professeurs allemands qui contribuent à la fondation de l’université de Leipzig en mai 1409.

L'université de Prague perd alors la majorité de ses étudiants et de sa faculté et décline pour devenir un établissement au rayonnement tout au plus national. Pendant quelques décennies, aucun titre n'est distribué. Il faut attendre l'empereur Sigismond puis surtout Rodolphe II qui refait de Prague sa capitale, pour voir l'université renaître de ses cendres.

La chapelle de Bethléem

La chapelle de Bethléem se trouve dans la Vieille-Ville de Prague, sur la place du même nom. Elevée de 1391 à 1402, elle représente un bâtiment d'un style très sobre répondant à celui d'une église-halle. Le maître Jean y prêchait quotidiennement, de 1402 à 1414, devant plus de 3000 personnes, artisans, ouvriers, petits commerçants, clercs sans emploi. Le lieu de fondation de la chapelle n'a pas été choisi au hasard. La première église prédicative tchèque devait être élevée au coeur du royaume de Bohême, dans la Vieille-Ville de Prague. Plus...

Kozí Hrádek

Excommunié le 21 février 1411 par Grégoire XII, Hus en appelle au jugement du Christ, instance inconnue du droit canonique. Il ne limite pas aux seules autorités ecclésiastiques ses diatribes et reste soutenu par les praguois. Hus entre, cette année-là, en conflit avec le roi de Bohême Venceslas IV, qui avait autorisé des envoyés du pape à vendre des indulgences pour l'organisation d'une croisade contre le roi de Naples. Il devient Persona non grata à Prague. Le soutien praguois donnera lieu à des manifestations à l’occasion desquelles trois « disciples » seront exécutés en public ce qui dressera ainsi le peuple contre le roi et l’église. Jan Hus se retire au château de Kozí Hradek, dans le sud de la Bohême, afin d’y rédiger son ouvrage De ecclesia et une Explication des Saints Évangiles (1413).

Krakovec

Krakovec est essentiellement connu pour avoir été le dernier lieu habité par le réformateur religieux tchèque Jan Hus, avant qu’il ne quitte la Bohême pour Constance. Le propriétaire du château de Krakovec de l’époque, Jindřich Lefl de Lažany, étant partisan de la réforme de l’enseignement, avait invité Jan Hus à Krakovec, lequel y était resté sous sa protection jusqu’en 1414. Plus...

Kostnice (Constance)

Kostnice (Constance), photo: AlterVista, CC BY-SA 3.0 UnportedKostnice (Constance), photo: AlterVista, CC BY-SA 3.0 Unported Constance (Konstanz en allemand) est une ville d'Allemagne, située dans le sud du Land de Bade-Wurtemberg. Son centre historique est enclavé sur la rive méridionale du lac de Constance (ou Bodensee). Il s'y tint de 1414 à 1418 un concile œcuménique (Concile de Constance) qui mit fin au grand schisme d'Occident en déposant les papes Jean XXIII et Benoît XIII, en acceptant la démission du pape Grégoire XII puis en nommant le pape Martin V. C'est dans ce même concile que furent jugés et condamnés au bûcher Jan Hus et Jérôme de Prague. Le clergé français y était représenté par Pierre d'Ailly, archevêque de Cambrai, et par Jean de Gerson, chancelier de l'université de Paris. Une stèle appelée Hussenstein est érigée à l'endroit même où était le bûcher.

 
 

Source : Radio Prague, Wikipédia
Adapté par : Štěpánka Budková